Sigean ville étape, ville frontière


Le terme de frontière reste durant tout le Moyen Age une notion assez instable et difficile à saisir même s’il s’impose timidement, au début du XIVème siècle avec les sens de « fortification » «et de « ligne de front » dans le vocabulaire de l’administration royale.

La croisade contre les « Albigeois » qui déferle à partir de 1209 sur les terres du Midi s’achève un demi-siècle plus tard par la mainmise de la couronne de France sur le Languedoc.

En 1258, le traité de Corbeil règle, au détriment des seigneurs locaux, un vieux différend entre la maison de Barcelone Aragon et l’administration royale française. Le roi d’Aragon Jacques 1er abandonne son rêve d’expansion vers le nord en cédant tous ses droits sur le Languedoc, excepté Montpellier, et en contrepartie le roi de France Louis IX renonce à ses prétentions sur la Catalogne, le Roussillon et la Cerdagne, malgré des privilèges hérités de ses prédécesseurs carolingiens. La nouvelle frontière définie par le traité de Corbeil est fixé sur la ligne de crête des Corbières.

Durant 400 ans, de Saint Louis à Louis XIV, la ligne de crête des Corbières, située à peu près sur la limite actuelle du département de l’Aude et des Pyrénées Orientales fut une frontière entre les deux grands royaumes d’Aragon et de France.

Mais cette « frontière » définie en 1258 à Corbeil semble davantage reposer sur la mémoire des lieux et la transmission orale que sur un bornage : « la crête des montagnes qui forment le versant des eaux. » Plus qu’une ligne continue, précisément délimitée, elle apparaît comme un no man’s land, aux marges souvent contestées, d’où émergent quelques points remarquables valorisés par une tradition orale séculaire. Il s’ensuit que la limite entre les deux royaumes reste floue, peu lisible et induit de nombreux malentendus entre les sujets des rois de France et de Majorque. Des guerres éclatent entre les deux royaumes. Ainsi en 1493 Louis XI annexe les comtés de Roussillon et de Cerdagne.

En 1503 Louis XII envoie une armée en Roussillon qui échoue devant Salses. Les Espagnols ripostent et s’emparent du château de Leucate. Ils ravagent et incendient : « La Palme, Sigean, Fitou, Treilles, Roquefort-des-Corbières, Castelmaure, Saint Jean de Barrou, Fraïsse, Villesèque et autres châteaux, bourgs et villages du pays jusqu’à Narbonne. »

Ce n’est qu’en 1659 lors de l’annexion du Roussillon et d’une partie de la Cerdagne par la France que cette frontière franco espagnole est repoussée sur les Pyrénées.