Vestiges d’une occupation humaine à l’âge du Fer 

L’oppidum de Pech Maho est situé sur la rive de la Berre près de l’étang de Sigean. Il est construit sur une colline calcaire de forme triangulaire d’une altitude de 29 mètres et d’une superficie de 2 hectares.
Au nord, il domine de 20 mètres la Berre et son ancienne embouchure aujourd’hui comblée (plaine du Lac ou « arena ») ; au sud, il s’élève à 5 mètres au-dessus du plateau des Oubiels ; vers l’est, à 500 mètres de l’oppidum, se trouve la nécropole au lieu-dit « Las Peirros ». 

L’habitat protohistorique du site a été reconnu sur 1 hectare.

 


Contexte :

L’histoire de l’oppidum de Pech Maho se situe durant l’Age du Fer (VIIe – Ier siècle avant J.-C.) Très tôt les indigènes de cette région sont en contact avec les Grecs et les Etrusques qui se font concurrence sur le marché commercial.

Au cours du VIème siècle, les habitants s’installent sur les hauteurs et se protègent de remparts : c’est la civilisation des oppida qui se développe jusqu’à la fin de l’Age du Fer. A côté de Pech Maho, on peut citer Ensérune et Mailhac. L’oppidum est le nom donné par les romains aux places fortifiées des Gaulois (ou celtes). Des noms de peuples locaux nous sont parvenus par les écrits : les Elisyques autour de Narbonne, les Sordes en Roussillon …
Dès le IIIème siècle, des Celtes arrivant de l’ouest, les Volques, s’installent dans l’Aude et dominent le pays jusqu’à l’arrivée des romains.


Historique :

L’oppidum a été fondé au dernier quart du VIème siècle ou au début du Vème siècle avant J.-C.. Le Site a été choisi pour 3 avantages : il forme un éperon barré, facilement défendable en cas d’attaque, il se trouve à proximité des étangs de Bages et de Sigean à cette époque reliés à la mer et navigables, enfin la « voie héracléenne » passait tout près et franchissait un gué sur la Berre vers le site.

Il faut effectivement savoir que durant l’âge du fer, l’essentiel du peuplement tend à se grouper dans des habitats (Oppida), le long des voies de communication dont ils contrôlent le trafic. Ainsi son emplacement est dû à un choix délibéré et astucieux qui lui permet de se développer en tant que comptoir commercial maritime tout en assurant sa défense. Cette vocation commerciale ne faiblira jamais durant ses quatre siècles d’existence.

Les fouilles archéologiques permettent de distinguer trois périodes dans la vie du site  :

1) Première période de 575 à 475/450 avant J.-C. :

La présence en très grand nombre de céramiques importées de Grèce (attique, corinthienne) d’Etrurie et de la péninsule Ibère (Espagne), montre une large ouverture aux échanges méditerranéens dès les débuts de l’oppidum. Les céramiques non tournées locales sont présentes ainsi que des céramiques de Marseille. Le système défensif consiste alors en un fossé long de 120 mètres, protégeant la face sud-est, surmonté d’une muraille épaisse et construits en adobe sur une base de solin de pierres ; il semblerait qu’il y avait quelques constructions à l’extérieur de l’enceinte.

2) Deuxième partie de 475/450 à 325/300 avant J.-C. :

Les maisons sont construites selon le plan d’urbanisme plus régulier en pâtés de maisons délimités par des rues formant vaguement un quadrillage. La muraille défensive est considérablement renforcée et l’entrée ouest est aménagée par une porte charretière flanquée de deux bastions.

La céramique locale modelée est peu à peu abandonnée pour la céramique tournée locale ibéro-languedocienne. Au niveau des importations, on remarque une augmentation des céramiques attiques et des amphores ibériques ce qui indique un commerce soutenu avec Ampurias (côte catalane de l’Espagne), grand centre distributeur de ces produits. De cette époque provient une lamelle de plomb trouvée dans un magasin de l’oppidum ; elle est inscrite en grec et étrusque et le texte grec est le compte-rendu d’une vente.

3) Troisième période de 325/300 à 225/200 avant J.-C. :

La ville se développe sur le même plan d’urbanisme que précédemment et on peut penser que certaines maisons sont haussées. Le système défensif n’évolue pas. Le commerce avec Ampurias s’intensifie comme en témoignent les importations de céramiques à vernis noir des ateliers de la baie de Rosas (côte catalane, Espagne), les céramiques grises de la côte catalane et les amphores ibéro-catalanes. De nombreux graphites en langue ibère sont inscrits sur un certain nombre de ces objets. De cette époque proviennent trois lamelles de plomb également trouvées dans un magasin et inscrites en ibère.

A la fin du IIIème siècle, l’oppidum est brutalement détruit après de violents combats : un bûcher d’incinération collectif est allumé pour quelques combattants sur les ruines des maisons. Quatre hypothèses se présentent à cette fin tragique : le passage d’Hannibal lors de la 2ème guerre punique (218-201 avant J.-C.) ; une intervention romaine lors de sa main mise sur le sud de la Gaule à partir d’Ampurias, l’arrivée des Volques ou encore des rivalités entre indigènes. L’oppidum après ce désastre est abandonné.


Intérêt du site :

La place qu’occupe Pech Maho à l’Age du Fer semble importante comme en attestent les témoignages de son commerce avec le monde méditerranéen à ses débuts puis avec le monde ibétique par le biais d’Ampurias. L’écriture ibère attestée en Manguedoc et à Pech Maho en particulier par les inscriptions sur céramique et lamelles de plomb, témoigne des échanges entre le monde ibère du nord-est de la Péninsule ibérique et le Languedoc. Pech Maho se trouve au cœur de ces échanges.


Oppidum et port de pêche d’importance notable, si l’on se réfère aux témoignages archéologiques, Pech Maho est un site majeur dans le paysage historique des VIe et IIIe siècles avant J.-C. : fortifications, urbanisme, habitat, traces d’artisanat et de commerce, témoignent du dynamisme de cette ville.


L’importance de l’oppidum, son activité commerciale soutenue avec le monde méditerranéen, sa fin tragique, en font un site remarquable et exemplaire pour l’Age du Fer.

 

Historique des recherches :

Découverte du site en 1913 par H.Rouzaud
Fouilles 1930-1948 : Amis du Vieux Sigean par J. Campardou
Fouilles 1948-1974 : CNRS par Yves Solier
Depuis 1997, étide du site et des fouilles par un collectif dirigé par E. Gailledrat (CNRS)
Site classé Monument Historique depuis 1961.